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ZIEGLER Jean

"Chaque homme qui meurt de faim aujourd’hui meurt assassiné"

13 novembre 2006

Lors d’une conférence de presse M. Jean Ziegler, rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation, a estimé qu’en l’état des capacités de l’agriculture mondiale et de l’obligation d’assistance en droit international, « tout enfant qui meurt de faim à l’heure actuelle meurt assassiné ».

Le premier des huit Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), « Réduire de moitié, entre 1990 et 2015, la proportion de la population dont le revenu est inférieur à un dollar par jour », ne sera jamais atteint, a affirmé Jean Ziegler, Rapporteur spécial auprès Nations Unies sur le droit à l’alimentation.

« Au contraire, le nombre de personnes qui souffrent de la faim ne fait qu’augmenter très rapidement », notamment en raison de la désertification, a-t-il souligné, lors d’une conférence de presse au siège de l’ONU, au lendemain de la présentation de son rapport à l’Assemblée générale.

Le rapport de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) 2005 souligne que 852 millions de personnes dans le monde souffrent de malnutrition chronique - soit un être humain sur six.

Un enfant de moins de 10 ans meurt de la faim toutes les cinq secondes et des centaines de milliers de personnes meurent de la faim ou de ses conséquences immédiates chaque jour.

Pourtant, selon le rapport, la production agricole actuelle pourrait sans problème fournir une nourriture suffisante, soit 2.700 calories adultes par jour à 12 milliards d’habitants, soit le double de la population mondiale actuelle.

« Il n’y a donc pas de fatalité à ce massacre silencieux. Un enfant qui meurt de faim aujourd’hui meurt assassiné », a dénoncé Jean Ziegler.

Le nombre de personnes sous-alimentées s’est accru de 11 millions entre 2004 et 2005. Il ne se stabilise qu’au regard de l’évolution démographique, a-t-il précisé.

« Des progrès impressionnants ont été réalisés, par exemple au Brésil. Le président Lula a tenu ses promesses : en 4 ans, la sous-alimentation de près de 44 millions de Brésiliens a presque disparu, grâce à la bourse familiale qui profite à 31 millions de Brésiliens et au programme ’Faim zéro’ », a-t-il rapporté.

Jean Ziegler a aussi cité l’initiative française rejointe par 15 pays, d’une taxe sur les billets d’avions. En fonction de la distance et de la classe, le passager paie de 6 à 15 euros en faveur d’un Fonds pour lutter contre le sida et la faim.

« Mais il y a eu de terribles défaites dans la lutte contre la faim », notamment la tragédie humanitaire au Darfour depuis février 2003, a-t-il encore dénoncé.

« Près de 650.000 affectées sont mortes de cette guerre menée par le gouvernement islamique arabe de Khartoum contre les très anciens peuples du Darfour, un territoire grand comme la France », a-t-il accusé, estimant que 320.000 personnes étaient menacées de famine en septembre parce qu’ils n’étaient plus accessibles en raison de l’insécurité.

Jean Ziegler a dénoncé la « paralysie de la communauté internationale » malgré la résolution du Conseil de sécurité. Le gouvernement du Soudan a refusé les termes de cette résolution et « malheureusement le Conseil de sécurité n’a pas le courage de poursuivre, en dépit du devoir d’assistance » les populations en danger consacré en droit international depuis 1991 contre Saddam Hussein, a-t-il regretté.

« Ce principe est supérieur à la souveraineté des Etats », a-t-il insisté, plaidant pour que le Conseil de sécurité le mette en application. « Le président des Etats-Unis parle de génocide, le Conseil de massacres », mais quelle que soit la qualification, il faudrait intervenir pour assurer l’assistance humanitaire.

Jean Ziegler a ensuite déploré l’effondrement du cycle de Doha sur les échanges économiques agricoles en janvier dernier, qui a pour conséquence le maintien des subsides aux agriculteurs européens et américains.

« Cela veut dire qu’aujourd’hui au grand marché de Dakar au Sénégal,vous pouvez acheter des légumes et des fruits de France, d’Italie, d’Espagne pour la moitié du prix ou le tiers du prix des produits équivalents en provenance d’Afrique. A quelques kilomètres de là, l’agriculteur africain croûlant sous la chaleur n’a pas la moindre chance de gagner sa vie », a-t-il expliqué.

« L’agriculture africaine est ruinée, littéralement, par le dumping agricole des pays industrialisés. L’année dernière, les pays de l’OCDE ont accordé 349 milliards de dollars en subsides à leurs agriculteurs », a-t-il encore accusé.

« Et après tout le monde est surpris que des Africains meurent dans le naufrage d’un barque, en tentant de rejoindre Mallorque ou Lampeduza. Ce sont des réfugiés de la faim », a dit le Rapporteur.

Jean Ziegler a enfin défendu le principe d’un « droit à l’alimentation » comme la seule arme pertinente contre ce massacre de la faim, estimant que l’approche néo-libérale de la « main invisible » n’était pas capable d’y remédier et déplorant que les Etats-Unis continuent de s’y opposer.

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