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THIRION Marie-Cécile

Conférence de l’OMC à Cancun : des discours aux actes...

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> Peuples en marche, n°188 - septembre 2003

Avant la conférence de Cancun de ce mois de septembre, tous les gouvernements affirmaient vouloir faire du commerce un outil au service du développement durable... Mais tout, dans leurs propositions de négociations, tend à démentir cette volonté affichée.

La cinquième Conférence ministérielle de l’OMC s’ouvre le 10 septembre à Cancun au Mexique. Que peut-on attendre de cette réunion ? Sera-t-elle la réaffirmation de l’engagement des Etats dans une libéralisation de plus en plus poussée des économies sans tenir compte des coûts sociaux et environnementaux de telles mesures ? Sera-t-elle la confirmation de la prééminence de quelques pays ? Si à première vue, tout laisse à penser que l’on s’achemine vers un accord reflétant un statu quo, la colère croissante des pays en développement face à cette situation pourrait réserver des surprises.

En premier lieu, la réunion de Cancun se tient dans un contexte de forte tension internationale : crise politique internationale avec la guerre en Irak, le développement du terrorisme et la remise en cause du rôle de l’Onu ; fragilité économique mondiale et ralentissement de la croissance du commerce avec une progression de 2% en 2002 contre 7% par an dans les années 90 ; remise en cause de plus en plus large de la pensée unique libérale et développement du mouvement alter-mondialisation. Cela risque fort de crisper les positions et d’accentuer le mouvement de repli sur soi des Etats.

Dans le même temps, c’est la première réunion importante depuis le lancement des négociations du “Cycle du développement” à Doha. Elle devrait permettre de faire le point sur l’état d’avancement des négociations dans sept domaines (agriculture, services, accès au marché des produits industriels, environnement, règles commerciales, appellations protégées, organe de règlement des différents) et sur l’engagement des Etats à faire du commerce un outil au service du développement durable. Mais si les discours officiels continuent d’affirmer ces préoccupations, les propositions de négociations tendent à le démentir.

L’agriculture toujours au centre des blocages

L’agriculture reste un sujet brûlant au sein de l’OMC. D’un côté, les pays en développement dont une large partie de l’économie, de l’emploi (souvent plus de 70%) et la sécurité alimentaire reposent directement sur la survie de leur agriculture. De l’autre, les pays industrialisés où l’agriculture représente moins de 10% de l’emploi, un pourcentage faible de l’économie, mais qui subventionnent massivement le secteur. Le déséquilibre n’est plus à démontrer.

Le secteur du coton est un cas d’école dans le domaine. Quatre pays africains ont déposé auprès de l’OMC au printemps une demande pour que soient reconnus les effets négatifs sur leurs exportations des subventions à la production pratiquées par plusieurs pays dont les Etats-Unis et l’Europe et que des compensations financières leur soient versées jusqu’à l’élimination de ces subventions. Cette demande sera examinée à Cancun mais l’issue est plus qu’incertaine.

Au niveau de l’accord agricole global, les espoirs d’avancées en faveur des pays en développement ne sont pas non plus grands. Les propositions pour la création d’une “boîte développement” qui permettrait à ces pays de protéger leur agriculture, ont été rejetées. Les Etats-Unis et l’Europe, dans leur dernière proposition de compromis fin août, se limitent à des engagements de poursuite d’une baisse progressive des soutiens ayant des effets distorsifs sur les marchés, de réduction des soutiens aux exportations mais rien en faveur des pays en développement à l’exception d’une entrée sur leur marché déjà largement octroyée. Restent les discussions engagées sur les produits stratégiques qui proposeraient un traitement spécial pour des produits essentiels pour la sécurité alimentaire et le développement rural national. Mais les oppositions sont nombreuses de la part, entre autres, des pays du groupe de “Cairns” (Argentine, Australie, Bolivie, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Guatemala, Indonésie, Malaisie, Nouvelle Zélande, Paraguay, Philippines, Afrique du Sud, Thaïlande et Uruguay), ainsi que des Etats-Unis.

Une ouverture des services sans visibilité

En première ligne pour réclamer l’ouverture de ce secteur, l’Europe et les Etats-Unis où les services représentent 2/3 du PNB et 70% des emplois. L’AGCS (Accord général sur le commerce des services) doit permettre d’encadrer cette libéralisation et propose une progression “à la carte” où les pays font des offres et des demandes d’ouverture. Ce processus engagé depuis 2000 paraît à première vue relativement favorable à la consultation et à la prise en compte des priorités nationales. Malheureusement, les pressions sont fortes pour accélérer le processus sans laisser aux pays, surtout ceux en développement, le temps d’analyser les conséquences.

D’une part, les négociations menées par les Etats-Unis et l’Europe en bilatéral engagent des ouvertures du secteur qui vont bien au-delà des demandes faites dans le cadre de l’OMC. D’autre part, au niveau international, le droit de mettre en œuvre des règles nationales en lien avec la protection sociale et environnementale est fortement limité au nom du principe de non discrimination. Enfin, contrairement aux engagements pris lors des premières négociations sur les services, aucune évaluation indépendante des impacts économiques, sociaux et environnementaux n’a été menée jusqu’à présent et les négociations continuent d’avancer sur la base d’effets positifs attendus largement théoriques. Reste que les attentes des pays industrialisés dans le secteur des services, comme dans celui des investissements, sont le meilleur atout des pays en développement dans ces négociations.

Que reste-t-il pour les pays en développement ?

Les deux sujets phares des négociations montrent bien que la volonté d’appuyer le développement des pays les plus pauvres se cantonne essentiellement au discours. La lenteur pour arriver à un accord sur l’accès aux médicaments renforce cette impression.

Enfin les pays en développement ne bénéficieront certainement pas à Cancun comme à Doha de la volonté affichée des pays dits “développés” de faire un geste en faveur des pays les plus pauvres après la crise du 11-Septembre.

Les Etats-Unis entrent en période préélectorale, l’Europe s’élargit, les priorités des principaux acteurs des négociations sont donc ailleurs et seule une montée en puissance et en force rassemblant l’ensemble des pays en développement pourrait peut-être changer le cours d’une rencontre qui s’annonce sans éclat ni espoir pour le développement durable.

document de référence rédigé le : 1er septembre 2003

date de mise en ligne : 2 septembre 2004

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