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SIMØ Endre, VOLOVITCH Raphaël

Entretien avec Endre Simø

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> in Peuples en marche, n° 189, octobre 2003

Le bilan du premier Forum social européen et du premier Forum social hongrois par Endre Simo, journaliste et militant.

- Peuples en marche - Quel bilan tirez-vous du premier Forum social européen de Florence, en novembre 2002 ?

Endre Simo - Florence a été un succès pour le mouvement social. La manifestation de 2 millions de personnes pour la paix, dans le contexte d’avant-guerre en Irak, a été historique, et a préparé la grande mobilisation internationale du 15 février 2003.
Seconde raison du succès : Florence a démontré une capacité d’organisation sur le plan européen en mobilisant des centaines de réseaux internationaux sur une réflexion commune : la transformation et le dépassement des rapports sociaux néo-libéraux. Et c’était la première fois que des mouvements d’une dizaine de pays de l’Est participaient à une rencontre de ce type avec des acteurs d’Europe de l’Ouest...

- Pem - Quelles suites à ce premier rendez-vous ?

E.S. - Florence a été très important pour nous, Hongrois : cela nous a aidés dans la création du Forum social hongrois d’avril 2003. Nos objectifs étaient la défense de la paix, la transformation d’une société néo-libérale capitaliste en une société où les intérêts collectifs aient leur place et où les droits humains et sociaux - tels qu’ils figurent par exemple dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948 - puissent être revendiqués.

- Pem - Qui participait à ce premier Forum social hongrois ?

E.S. - Il y avait 700 organisations, des syndicats, des communautés religieuses. D’ailleurs, un atelier intitulé “Croyants et non-croyants : futur commun” était organisé. En effet, l’église catholique hongroise, mais également l’église calviniste ou évangélique, sont assez conservatrices, ce qui handicape un rapprochement avec les organisations de gauche. Il faut que les croyants puissent intégrer ce mouvement : la majorité écrasante d’entre eux, avec leurs convictions, portent des valeurs humaines dont nous avons tous besoin. Il faut trouver une synthèse entre la croix et l’étoile rouge.

- Pem - L’”étoile rouge” ?

E.S. - La chute du socialisme réel - que j’appellerai le socialisme “primitif” - a bouleversé notre vie sociale et spirituelle. Les gens ne voulaient pas perdre la sécurité sociale héritée de la période socialiste, tout en voulant plus de liberté et de démocratie. Ils ont pourtant perdu cette sécurité sociale. Aujourd’hui, sur 10 millions de Hongrois, environ 3 millions vivent au-dessous du seuil minimum social (200€/mois), avec 70 ou 80€ par mois. D’après la FAO [1], des milliers d’enfants en Hongrie sont sous-alimentés. Des maladies liées à la pauvreté que nous ne connaissions plus, comme la tuberculose, réapparaissent... Les gens ne sont pas nostalgiques du passé. Mais ils veulent pouvoir concilier justice sociale et liberté.

- Pem - Pour en revenir au Forum social hongrois, quels en sont les enjeux aujourd’hui ?

E.S. - Le Forum social hongrois a le grand mérite d’être né, mais il est encore très jeune. A nous de le renforcer. En particulier, nos syndicats doivent apprendre à combattre et à vraiment défendre les intérêts des travailleurs. Pendant le socialisme, le dirigeant de la Confédération syndicale hongroise était en même temps membre du bureau politique du Parti socialiste ouvrier hongrois... Aujourd’hui, les confédérations syndicales sont entrées dans une phase de formation : elles doivent être moins bureaucratiques et garder leur autonomie vis-à-vis du gouvernement et des partis politiques. Ainsi, quand il a fallu mobiliser la rue, notamment contre la privatisation des hôpitaux, elles se sont senties “coincées” parce qu’elles étaient en négociation avec le gouvernement...
Je suis certain que cet apprentissage connaîtra une forte accélération après l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne, notamment dans le cadre de la Confédération européenne des syndicats (CES). Ces syndicats seront-ils présents au Forum syndical européen de St-Denis ? Beaucoup suivent encore davantage les indications du Parti socialiste hongrois que de la CES... Ils doivent pourtant exprimer les intérêts des travailleurs car, en dépit d’effectifs en baisse, ils gardent un fort pouvoir de mobilisation.

- Pem - Comment se prépare le Forum social européen de Paris-St-Denis ?

E.S. - Je suis très content que pour ce Forum, nos amis de l’Ouest - notamment Français - nous aient aidés à assurer aux pays de l’Est 36 places d’orateurs. Ils n’étaient que 8 à Florence. J’y vois d’une part l’expression du respect vis-à-vis d’un mouvement naissant en Europe de l’Est avec d’énormes difficultés politiques et financières, et d’autre part un encouragement moral à notre réseau “Esf-East” qui regroupe aujourd’hui des centaines d’organisations d’une quinzaine de pays ex-socialistes, du Kazakstan à l’Albanie et de la Pologne à la Russie.
Cette solidarité avec l’Ouest est indispensable pour assurer le futur de ce réseau ainsi que l’intégration des organisations civiles de l’Europe centrale et orientale avec celles de l’Ouest. Notre tâche doit être la rencontre de nos organisations dans le cadre de l’Union européenne, et le maintien des contacts avec ceux qui restent en-dehors.

- Pem - Quel regard portez-vous sur l’Union européenne ?

E.S. - L’adhésion à l’Union européenne nous offre une nouvelle opportunité pour transformer cette Union néo-libérale et monétaire en Union sociale des peuples. Cette tâche fondamentale doit être commune à tous les mouvements sociaux européens.
Il y a chez nous aussi des gens - une minorité - qui rejettent l’Union européenne : ils y voient l’expression du capitalisme, de l’impérialisme et de la guerre. Beaucoup d’autres pensent que l’adhésion améliorera leurs conditions de vie. Sans doute, certains verront leur situation matérielle s’améliorer. Mais la pauvreté ne disparaîtra pas. Les problèmes économiques et sociaux fondamentaux ne seront résolus qu’en cherchant à dépasser le néo-libéralisme lui-même. C’est un travail que nous devons mener ensemble, vous, anciens membres de l’Union européenne, et nous, les nouveaux. Nous devons travailler dans le cadre de nos institutions nationales respectives tout en relevant le défi de travailler dans le cadre d’institutions communautaires. Cela exige beaucoup d’intelligence, beaucoup d’organisation, beaucoup de force.

[1] Organisation pour l’Agriculture et l’Alimentation, qui dépend de l’Onu

document de référence rédigé le : 1er octobre 2003

date de mise en ligne : 6 septembre 2004

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