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VOLOVITCH Raphaël

Comment naît un FSE... Le choc des cultures (d’organisation)

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> Peuples en marche, n°189, octobre 2003

"Je n’ai jamais vu une organisation aussi inefficace qui accouche d’un événement aussi efficace". C’est en ces termes, en décembre 2002, qu’un intervenant britannique commentait le premier Forum social européen de Florence. Si, à l’heure où nous “bouclons”, on ne sait rien du succès du FSE qui s’annonce, on peut déjà essayer de tirer quelques éléments de bilan de sa préparation.

A Porto Alegre, elles sont huit (organisations), ici, nous sommes des milliers... à vouloir préparer le FSE. Pour organiser cet afflux de participation, un organigramme à la facture très classique a été mis en place : des assemblées délibératives françaises et européennes s’appuyant sur les propositions de groupes de travail (eux-mêmes divisés en sous-groupes), un exécutif français. Toutes ces enceintes sont largement ouvertes (des critères de participation sont décidés... mais facilement détournés). Des réunions à niveaux multiples sont organisées : sur l’année écoulée, cinq assemblées européennes de préparation se sont réunies (à St-Denis puis Bruxelles, Berlin, Gênes et enfin Bobigny), au moins un Comité d’initiative français par mois (réunissant en moyenne 100 personnes), des réunions de groupe de travail tous les jours. Bref, d’après nos calculs, plus de 300 réunions “publiques” pour préparer le prochain FSE.

Là-dessus, le mode de fonctionnement est “participatif” et “non-hiérarchique”, le contrôle s’opère par la “transparence”, les décisions se prennent par “accord général”.

Tyrannie de la déstructuration

L’éthique de la dés-organisation - ce refus de la hiérarchie et des modes habituels de prise de décision - possède un très grand potentiel, notamment en ce qu’il permet à toutes les organisations, quelle que soit leur taille, d’être partie prenante au processus. L’inconvénient de ce mode d’organisation est ce que Tim Jordan (S’engager, Ed. Autrement, 2003) identifie comme la “tyrannie de la déstructuration”. "Les réseaux plats de coordination, qui refusent toute hiérarchie, sont bons sur le principe : tout le monde peut venir, parler, participer, prendre part à la décision. Mais, en pratique, il existe des hiérarchies implicites". Des groupes d’affinités se forment, s’auto-légitiment, des décisions se prennent hors du cadre de la réunion. Et l’accord général est décrété par quelques-uns...

L’inconvénient devient un vrai problème quand il est introduit dans une machinerie aussi énorme, hétérogène et fragile que le processus de préparation du FSE. A l’épreuve du nombre de réunions auxquelles il faudrait participer, de la complexité des réseaux qu’il faudrait tisser, le principe affiché de la "participation égale et transparente" vire à l’hypocrisie.

Problème critique...

Enfin, le vrai problème devient franchement critique quand les règles et procédures difficilement édictées ne sont pas respectées, que les tractations de couloirs et coups de forces deviennent de plus en plus efficaces et que, finalement, tout le monde se rallie à ce mode opératoire parallèle. Les décisions les plus anodines sont érigées en enjeux de pouvoir. Les petits calculs mais aussi les frustrations, les rancœurs s’accumulent, venant nourrir une posture militante chargée “d’intelligence politique” et de méfiance.

Certes, cela vient nourrir l’esthétisme dont nous habillons notre engagement, mais au bout de dix mois passés ensemble, on se demande si on ne repart pas avec de plus mauvaises habitudes que celles qu’on avait en arrivant.

Ce mode d’organisation n’en demeure pas moins un garant d’ouverture et a produit de la fluidité entre les organisations qui se sont découvertes à l’occasion de la préparation du FSE. Mais de grands efforts sont encore à accomplir pour faire progresser les logiques de confiance au sein de ce nouvel espace. Patrick Viveret, qui participe à la réflexion sur la démocratie au sein du mouvement, était, en janvier 2003, assez sceptique sur l’orientation prise : "Notre problème, c’est que nous avons le capitalisme ancré dans nos têtes : nous avons beaucoup de mal à sortir de nos logiques de territoires et nous transportons les rivalités en notre sein. Malgré notre slogan, “le monde n’est pas une marchandise”, nous reproduisons tous la marchandisation en tentant, à qui mieux mieux, de vendre le produit de nos associations".

Gageons que nous avons progressé depuis. Surtout, mobilisons-nous autour de cet enjeu primordial au-delà de l’organisation du Forum social européen.

Le comité des entités brésiliennes qui a pensé et organisé le premier Forum social mondial, réalisé à Porto Alegre du 25 au 30 janvier 2001, estime, après avoir évalué les résultats de ce Forum et les attentes qu’il a créées, qu’il est nécessaire et légitime d’établir une Charte des principes qui oriente la continuité de cette initiative : [...]"Les principes contenus dans la Charte [devront] être respectés par tous ceux qui désireront participer à ce processus et organiser [...]."

document de référence rédigé le : 1er octobre 2003

date de mise en ligne : 6 septembre 2004

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